En Bolivie, aux portes de l´Amazonie vit la communauté Eyiyoquibo. Cette communauté de l'ethnie Ese Ejja, a dû se sédentariser il y a 15ans sur un terrain situé à seulement 6km de la ville. Ce peuple nomade vivait auparavant le long du fleuve Beni de la cueillette, de la pêche et de la chasse à l´aide d´arcs et de flèches.
Cette sédentarisation est très difficile pour eux et la communauté reste toujours fragilisée  par ce changement brutal et imposé de leur mode de vie séculaire.


Le terrain qui leur a été donné ne contient que 8 hectares de terres cultivables pour leurs 66 familles alors que la moyenne des surfaces cultivables dans les communautés avoisinantes et de 1 hectare par famille.  De plus l’agriculture leur est encore inconnue, le terrain est pauvre en plantes comestibles, le gibier devient rare et les matériaux nécessaires à la confection de leur artisanat sont difficilement accessibles; Il ne leur reste que la pêche pour survivre.
Peuple de la rivière, ils sont de grands spécialistes de la pêche, qu'ils pratiquent toute l'année. Le poisson est leur principale ressource d´alimentation et d'échange. Ils partent régulièrement pêcher plusieurs semaines de suite en aval du fleuve à la recherche de poissons en quantité suffisante.
Ce sont les hommes qui pêchent, mais en général les femmes les accompagnent sauf en périodes de pluie. Pendant ces semaines la plupart des enfants se retrouvent seuls, livrés à eux-mêmes et parfois affamés. Ils vont alors en ville à la recherche de nourriture et de divertissement.


L'attrait de la ville et ses conséquences

Lorsque les parents rentrent de la pêche, ils mangent une partie de leurs poissons et vendent le reste en ville.
Ils ont prit l'habitude de s'y rendre, cette ville n'étant située qu'à 6km de leur terrain.  Par cette proximité et leurs visites répétées de nouvelles nécessités matérielles s'imposent peu à peu à eux. Afin de répondre à ces nouveaux besoins de “consommation” certains travaillent comme manœuvres mais beaucoup d'employeurs les exploitent. D'autres, par facilité prennent l'habitude de mendier, notamment les enfants. Certaines femmes se prostituent.

L'argent récolté leurs permet d'acheter de la nourriture mais aussi de nouveaux produits qui ne leurs étaient pas nécessaires jusque-là . Fragiles et non avertis, ils ont découvert l'alcool et beaucoup en sont devenus dépendants y compris certains enfants.
Une trentaine d'enfants de moins de 13 ans de la communauté se rend régulièrement en ville à Rurrenabaque, enclave touristique de la forêt amazonienne, où ils viennent se nourrir et se divertir dans ce grand cirque bruyant et lumineux.

Ils mendient, volent les commerçants et les touristes, errent dans les rues, s'hypnotisent de longues heures dans les cybercafés devant les jeux-vidéos qu'ils maîtrisent à la perfection, mangent dans les poubelles et finissent par dormir en ville à même le sol, bien souvent alcoolisés.
Beaucoup d'habitants de Rurrenabaque et de San Buenaventura rejettent les Esse Ejja  sans s'intéresser à leur culture ni à leurs conditions de vie. Certains les considèrent seulement comme des “dégénérés” et des “alcooliques”. Cette barrière s'est construite sur la différence entre ces deux modes de vie, et sur l'image des Esse Ejja errants le long du fleuve, dormants sur le sol, les habits sales et souvent alcoolisés. Ils n'ont jamais eu la curiosité de les questionner, de chercher à comprendre les origines de la communauté ou même de les découvrir dans leur élément : Le Fleuve.




Aujourd'hui cette ethnie encore “pure” et sereine il y a quelques années se retrouve perdue entre deux mondes, entre deux époques, ne sachant que faire pour retrouver son autonomie, sa dignité et sa liberté, indispensables à sa survie.

 L´Histoire de la communauté Esse Ejja d´Eyiyoquibo




Les Esse Ejja sont les descendants d'un peuple nomade vivant le long des fleuves de la forêt amazonienne entre le Pérou la Bolivie et le Brésil.

Au début du XX ème siècle ce peuple ce divise en trois groupes : Les Bahuajja (Pérou), les Sonenes (Brésil), et les Esse Ejja (Bolivie). Les Esse Ejja se divisent ensuite en 2 groupes, Les Equijati, près de Riberalta et les Hepahuatahe près de Rurrenabaque. Ces derniers restent nomades jusqu'à la fin des années 90, séparés en petits groupes le long du fleuve Beni dans un périmètre d'environ 40km.

Ces groupes nommés “choza” en Castillan sont constitués de familles d'environ 4 membres, basées sur une structure nucléaire: le père, la mère et les enfants non mariés. Ils vivent avant tout de pêche, de chasse à l'aide d'arcs et flèches et de cueillette. Ils ont des connaissances en artisanat et construisent leurs objets usuels. Ils dorment dehors, parfois se construisent de petits toits en feuilles, parfois ils s'enterrent dans le sable pour se protéger du froid.

En 1999, les autorités Boliviennes et des évangélistes américains décident “pour leurs bien”, qu'ils doivent cesser de vivre de la sorte. Ils choisissent pour eux de les concentrer sur un terrain qu'ils leurs est offert, situé à 6 km de San Buenaventura, qu'ils nomment Eyiyoquibo.

Ils y construisent une école et leur enseignent l'espagnol (leur langue étant le Esse Ejja) ainsi que la religion chrétienne de la branche évangéliste. Depuis les Esse Ejja vivent de manière sédentaire, regroupés sur ce terrain.